Amir Or,
(Israël, 1956)





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Biographie


Né à Tel Aviv en 1956, Amir Or est une figure marquante de la poésie israélienne contemporaine. Il a étudié la philosophie et l’histoire des religions à l’université hébraïque de Jérusalem où il a enseigné la religion de la Grèce antique.

Il est l'auteur de onze recueils de poésie en hébreu dont certains sont traduits dans une quarantaine de langues. Ses derniers ouvrages parus en Israël sont La prophétie du fou (2012), Butin (anthologie personnelle 1977-2013) et Ailes (2015) et un roman Le royaume (2015). Amir Or est lauréat de prestigieuses bourses d’écritures et de nombreux prix littéraires. Il organise régulièrement des ateliers d’écriture aussi bien en Israël qu’à l’étranger et a traduit en hébreu huit livres de prose et de poésie, notamment L'Évangile selon Thomas, Dernières nouvelles du Mahâbhârata et une anthologie de poésie érotique grecque. Il a reçu le prix du ministère israélien de la Culture pour ses traductions du grec ancien.

En 1990, Amir Or a fondé la société poétique Helicon où il a longtemps assuré la direction de la revue du même nom. Il est également éditeur de la revue poétique « Katuv » et rédacteur en chef pour Israël de la revue de poésie internationale « Atlas magazine ». Il est l’un des membres fondateurs du World Poetry Movement et de l’European Association of Writing Programs. Il est aussi coordinateur national du mouvement Poets for Peace.

Lors du fiEstival *10 (Bruxelles), il publie son premier livre de poésie chez maelstrÖm, Dédale (édition bilingue hébreu-français, 2016) après un premier recueil traduit en français, Le Musée du Temps (Editions de l'Amandier, 2013).

http://www.prinpolux.lu/amir_or.htm



Poème



Encore

Ainsi je ne te regarde même pas mais je préfère la fenêtre,
l’œil cerné de noir et de gris s’éloigne à présent
pour découvrir ici quelques lignes brisées de croissance
dont le cœur est un et invisible.
Comme la peau sèche, ancienne d’un éléphant, fissurée d‘îles,
l’olivier rassemble ses plis
dans un creux de vieilles courbes noyées d’ombre,
pour étirer ses crêtes séchées par le soleil. Là
au-dessus de l’écorce un nouveau-né penché sur un sein :
un clou rouillé.
Au-delà je ne regarde pas, ne pense pas. Comment puis-je
penser aux feuilles argentées dehors dans la lumière du crépuscule,
sur le ciel au-dessus d’elles, plus haut que mon regard. Comment puis-je
penser à l’infini et au vide à présent, quand tu vas
mourir. Et quand tu vas mourir, comment je puis
ne pas penser à toi. Comment ? Penser peut-être aux biens-aimés
qui n’ont pas encore été, peut-être même aux vivants.
Penser que même alors il y a encore une pensée pour toi,
et même le croire. Puis-je être aussi fort
seulement pour ce que tu m’as fait maintenant que tu es mort.
Demain je t’écrirai quelques mots, une épitaphe, au moins une ligne,
quelque chose de poétique comme par exemple « Ici repose un danseur ».
Et si ça ne suffit pas pour t’enterrer, certainement j’élargirai : Arrosez-moi écrirai-je sur le marbre, arrosez-moi,
J’ai soif. Arrosez-moi, sans l’eau. Arrosez-moi,
sans raisonnements lucides. Arrosez-moi, sans nom.
Arrosez-moi sans vin. Arrosez-moi, rien d’autre.
Arrosez-moi. La beauté ne suffit pas, pas assez d’amour, pas assez de dieu –
Même cette vie ne suffit pas, ni une autre. Arrosez-moi,
j’ai soif.


(Traduit de l’hébreu par Michel Eckhard Elial)



Prière d’Orphée

La mort, encore la mort et toujours plus de sable.
Sur la place nous étions affamés d’être

Enveloppant la ville comme l’ombre des hauteurs,
dans ces images de réveil, quelle présence ?

Etranger dans mon corps, sans pouvoir encore
faire vibrer l’air

Tant d’années pour passer dans ces sables morts
la montagne est une éclipse de vision, un mirage.

Sables mouvants sous nos pieds comme une mémoire
sans commencement, chaque lieu est partout.

D’où cheminer : faire monter ou descendre le chemin,
toi derrière mes yeux, mon regard est-il toujours devant ?

Seuls, nous avons traversé de vastes marais
sur des visages noyés qui lentement s’effacent.

Des années durant, nous étions immortels.
Sous les toits d’Amsterdam, le désespoir à la fenêtre.

Aussi longtemps faut-il marcher encore
entre les sables et les morts ?

Donne-nous une autre histoire, une nouvelle mort


(Traduit de l’hébreu par Michel Eckhard Elial)